Artisanat d'art
Les Ateliers St-Cyr accueillent deux nouveaux artisans
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Le fil de sa vie
Malgré sa grande silhouette, Véronique Boyens vous met immédiatement à l’aise, a le tutoiement facile et le regard franc. Sur son tabouret, dans son atelier de l’Espace St-Cyr, elle déroule le fil de sa vie sans détour. Autour d’elle, des roues de vélo et des bobines de fils qu’elle travaille depuis un système suspendu au plafond.
Une roue de vélo et du fil
A seulement 44 ans, Véronique comptabilise 20 ans dans la communication marketing dont 10 aux Etats-Unis. Elle s’y est installée à 30 ans et son métier l’a fait voyager dans tout le pays. Il lui a surtout permis d’assouvir sa passion pour la photographie. De fil en aiguille, ses photos sont exposées à Paris, Bruxelles (son pays d’origine), New York… « La photo n’est pas mon métier de base. Je ne cherchais pas à vendre, juste à exprimer ma fibre créatrice » précise-t-elle pourtant. Deux événements vont modifier le cours de sa carrière : le Covid et la maladie de son compagnon. « En 2019, j’ai voulu arrêter le marketing et mettre ma passion pour la photo au service des entreprises. Mais le Covid et le confinement m’ont donné le temps d’y réfléchir. Finalement, je me suis aperçue que cette idée ne me convenait pas » confie-t-elle. Véronique mettra de toute façon sa vie entre parenthèses pour se consacrer à son compagnon. Pour se « vider la tête », elle commence à réaliser des tableaux à base de fil tendu. Elle utilise des roues de vélo et du fil de couture. « En 2021, j’ai lu un article qui parlait d’un ingénieur grec qui est parvenu à traduire la technique de l’image, donc du pixel, en lignes droites. L’idée d’associer la photo et le fil m’a séduite. Je suis partie de cette technique, que j’ai améliorée pendant 2 ans pour réaliser mes tableaux » montre Véronique. Elle utilise toujours des roues de vélo qu’elle ponce, peint, cercle de cuir et sur lesquelles elle pose 200 à 300 accroches. Dessus, elle tire son fil en ligne droite, sans jamais le nouer ni l’interrompre. Le nombre de passages à un même endroit crée des zones plus ou moins sombres, dessine un visage, lui donne du relief. Sa Joconde, sa Jeune fille à la perle ou encore sa Vénus de Botticelli, sont criants de réalisme.
Ses portraits dans des châteaux
Tout est ensuite allé très vite. En janvier 2023, elle reçoit une lettre d’Ateliers d’Art de France qui l’informe qu’elle est sélectionnée pour exposer au salon Révélations à Paris. Marie-Laure Letellier, commissaire d’exposition au Carré St-Cyr, au Vaudreuil, la repère et lui propose de participer à l’exposition « Ce qui nous lie ». « J’ai découvert les Ateliers à cette occasion et j’ai eu envie de m’installer dans de bonnes conditions » sourit Véronique. Plus que l’atelier, elle apprécie le lien qui se noue entre artisans, de pouvoir échanger sur des problématiques communes. « On sent ici l’ambition de l’Agglo de développer les métiers d’art comme activité économique. C’est un lieu qu’on a envie de faire rayonner. Je me sens très redevable d’être ici. » Des châteaux, des maisons de haute couture, des architectes d’intérieur s’intéressent à ses portraits. La filographe veut encore faire évoluer son art, en y intégrant ça et là quelques fils de couleur ou en s’essayant à l’art contemporain. De quoi lui donner peut-être du fil à retordre… ce qui n’est pas pour lui déplaire.
+ d’infos : contact@veroniqueboyens.com veroniqueboyens.com 07 68 05 49 39 Logo insta
Du bois naît la musique
« J’ai démarré mon activité chez moi, en région parisienne, mais je cherchais un lieu à partager avec d’autres artisans d’art. Ici c’est l’endroit parfait. Je veux m’isoler pour travailler : je ferme ma porte ; je l’ouvre si je veux participer au microcosme du lieu. »
Agathe Bejerano s’est installée en novembre aux Ateliers St-Cyr. Elle a quitté la région parisienne pour gagner en espace sans trop s’éloigner de sa famille. « Et le loyer est progressif, ce qui est très appréciable quand on démarre » ajoute-t-elle. Ses études littéraires n’étaient pas censées la mener à la fabrication de violes de gambe.
La rencontre avec une luthière a été le déclic. L’école nationale de lutherie, à Mirecourt, dans les Vosges, lui a appris à fabriquer des instruments à cordes frottées mais c’est sur la viole de gambe qu’elle a jeté son dévolu. « Je joue du violon depuis l’âge de 3 ans et la viole en est la cousine. Il y a 6 ou 7 cordes, elle se joue avec un archet et il existe plusieurs tailles. Il est possible d’agir sur le son à différentes étapes de sa fabrication et c’est un instrument qui est personnalisable. Le fait de pouvoir adapter le son et l’esthétique à chaque musicien, comme à l’époque baroque, m’intéresse beaucoup et la musique écrite pour cet instrument est magnifique » justifie la luthière.
Un lieu inspirant
Sous ses doigts, l’épicéa devient table d’harmonie, l’érable ou le noyer les autres parties de l’instrument. Il faut 2 à 4 mois pour fabriquer une viole. « Il n’existe qu’une douzaine de luthiers de violes de gambe en France et c’est un instrument qui connaît un renouveau depuis une quarantaine d’années, notamment grâce au film « Tous les matins du monde » indique Agathe. Le son de la viole, associé au cadre de l’Espace St-Cyr a quelque chose de magique. « Ce lieu est très inspirant. L’atelier est lumineux, j’entends la cloche de l’église. Avoir sa place dans une Agglo tellement investie dans les métiers d’art et la culture est une vraie chance pour moi. Elle donne un cadre professionnel à mon entreprise, me tire vers le haut, et me donne l’impression que je participe moi aussi à l’évolution de mon métier », confie l’artisan. Un jour, si elle peut, Agathe aimerait aussi transmettre son savoir et perpétuer ainsi son métier de luthier.
+ d’infos : agathe.bejerano@gmail.com 06 68 15 66 99 agathebejerano.wixsite.com/my-site-1 logos FB et Insta