Culture

Suzanne Lipinska nous a quittés

Suzanne Lipinska s’est éteinte ce vendredi 30 septembre, à l’âge de 94 ans. Elle a consacré sa vie à faire du Moulin d’Andé le haut lieu culturel qu’il est aujourd’hui.

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Stanislas Lipinski, son petit-fils, indique dans son post que « Suzon est partie paisiblement ».

Cette grande dame aux yeux bleus et à l’éternelle tresse laissera une empreinte indélébile au Moulin d’Andé, auquel elle a consacré sa vie. « Une étoile nous a quittés mais elle continuera à briller dans le firmament culturel de la région, a confié Bernard Leroy, président de l’Agglo Seine-Eure, à l’annonce de son décès. Suzanne a participé au rayonnement du territoire Seine-Eure. »

« Parler de vous c’est parler du moulin tant votre âme est empreinte de ce lieu et tant l’âme de ce moulin est emplie de la vôtre » avait déclaré Sébastien Lecornu le 3 septembre dernier quand il lui avait remis les insignes d’officier de la Légion d’Honneur.

Suzanne et le moulin, c’est une grande histoire d’amour qui a commencé enfant, quand elle venait de Connelles pour lire à l’ombre du saule. Le moulin appartenait encore à Louis Renault. Son père l’achète et lui offre en cadeau de mariage. A son divorce en 1956, Suzanne décide de s’y installer avec ses 3 enfants.

Suzanne a des amis artistes, qui ont les leurs. Elle leur ouvre les portes de son moulin joyeusement et simplement. Dans cette « ruche artistique » émergent des œuvres qui marqueront leur époque et Suzanne n’hésite pas à réaménager les lieux en fonction des besoins des uns et des autres.

Petit à petit, le grenier se transforme en chambres. L’étable devient une bibliothèque. L’Orangerie est convertie en théâtre. Un peintre a besoin d’un atelier ? Elle fait tomber les murs d’un bâtiment pour faire poser des vitres et laisser entrer la lumière. Elle fait construire de nouveaux bâtiments qui vont se fondre merveilleusement dans l’ensemble. « J’ai le mérite d’avoir fourni un outil dont certains avaient besoin à un certain moment » expliquait Suzanne tout simplement.

Le rêve de sa vie : faire vivre le moulin

Que le moulin devienne une résidence d’artistes est une décision qu’elle a pris le 29 juin 1957. Entourée de quelques amis écrivains et peintres, elle décide de donner un premier concert de musique ancienne. « Ce jour-là, j’officialisais le rêve de toute ma vie : faire vivre le moulin, en faire un lieu de création, de partage et d’échange et ne plus le quitter » retraçait Suzanne en septembre dernier.

Ici, de grands auteurs, compositeurs, cinéastes ont trouvé l’environnement propice à la création. Lieu fétiche de la Nouvelle Vague, Suzanne a accueilli François Truffaut, Louis Malle, Alain Cavalier, Jean-Paul Rappeneau et beaucoup d’autres. Maurice Pons est arrivé au moulin ce fameux 29 juin 1957 pour ne plus jamais en repartir. En créant un lieu propice à l’émulation intellectuelle, Suzanne a participé d’une certaine manière à l’émergence de bon nombre de films, livres, musiques, compositions…

Pour faire perdurer la vocation du moulin, Suzanne crée en 1962 l’association culturelle du moulin d’Andé dont les 60 ans ont été célébrés cet été. L’œuvre de toute une vie a été récompensée par les insignes de chevalier de la Légion d’Honneur que Suzanne a reçues en 1998. En 2018, elle a été élevée au rang de commandeur des arts et des lettres par l’ancienne ministre de la Culture Françoise Nyssen. Le 3 septembre 2022, Sébastien Lecornu, ministre des Armées et président du Département lui avait rendu un bel hommage et l’avait décoré de l’insigne d’officier de la Légion d’Honneur.

Depuis quelques années, Stanislas, son petit-fils, a pris la relève. Il assure vouloir poursuivre l’œuvre de Suzanne. De nouvelles pages culturelles devraient continuer à s’écrire au Moulin.